jeudi 10 octobre 2013

Les régimes de retraite 3 - Régimes individuels

Les régimes publics ont été couverts dans la Partie 1 alors que les régimes d'employeurs ont été vus dans la Partie 2. Dans cette troisième partie, je discuterai des régimes individuels tels que le REÉR et le CÉLI. 

Octobre est le Mois de la planification financière de la retraite. Je vous invite à visiter le site de Question Retraite. Le site contient une foule de renseignements et d'outils pour vous aider dans votre planification. Vous pouvez entre autres vous inscrire au Défi 10%, qui vous incite à épargner 10% de votre salaire net pour la retraite.

Voyons maintenant les régimes individuels, dernier palier de notre pyramide de la retraite.

Pyramide de la retraite. Tirée de Plamondon et Sauvé.
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Les régimes individuels

En tant que troisième palier de notre pyramide de la retraite, les régimes individuels permettent de compléter l'ascension vers l'indépendance financière. Le choix des composantes de ce palier revient à la personne elle-même, qui peut bien sûr recevoir l'aide de conseillers financiers et d'institutions financières pour en effectuer la gestion.

a) Enregistrés ou non?

Un régime enregistré est un contrat déposé à l'Agence de revenu du Canada (ARC) selon lequel un épargnant investit en vue d'atteindre un objectif précis. La croissance de l'argent épargné se fait alors à l'abri de l'impôt, à condition que certaines règles soient suivies notamment en ce qui concerne les retraits. Les régimes enregistrés les plus connus sont le régime enregistré d'épargne-retraite (REÉR) et le compte d'épargne libre d'impôt (CÉLI). J'ai déjà parlé de ceux-ci dans un billet précédent.

Il est important de rappeler que les régimes comme le REÉR et le CÉLI ne sont pas des produits financiers mais bien une façon de gérer un ensemble de produits financiers. On peut les imaginer comme des contenants que l'on peut remplir ensuite avec des produits comme des comptes d'épargne, des fonds communs, des actions, des certificats de placement garanti...

Les sommes investies dans un régime enregistré, peu importe le produit financier choisi, croissent donc à l'abri de l'impôt. Le caractère exponentiel des intérêts composés prend alors plus de force. Voyons ensemble un exemple, avec graphique à l'appui.


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Supposons qu'une personne verse 5000$ par année dans son REÉR, qu'elle est imposée à 40% et que le rendement annuel de ses placements est de 8%.

Sur le graphique ci-dessus, la courbe bleue représente la croissance de son REÉR avant impôts. Au bout de 25 ans, ses placements auront une valeur d'environ 365 500$.

La courbe verte montre le résultat si les placements sont dans un compte non enregistré. Après impôts, ce sont 3000$ qui sont investis chaque année au lieu de 5000$. De plus, le rendement est aussi imposable : il sera de 4.8% au lieu de 8% (voir mon commentaire dans mon billet sur l'inflation). Après 25 ans, la valeur des placements ne sera que de 139 300$.

La courbe rouge montre la situation après impôts pour le REÉR. Si, après 25 ans, tout le REÉR était retiré, l'investisseur paierait 40% d'impôts et aurait 219 300$ dans ses poches.

Plus le temps avance, plus l'écart se creuse. C'est ce genre de graphique qui montre la force des intérêts composés et l'importance d'épargner très tôt dans la vie.

b) Le régime enregistré d'épargne-retraite (REÉR)

C'est le plus connu des régimes enregistrés. Créé en 1957, c'est le véhicule par excellence pour la préparation de la retraite. C'est un régime à impôts différés, ce qui signifie que le gouvernement nous permet d'investir des dollars non imposés (d'où le fameux retour d'impôts) à condition qu'on paie les impôts lors du retrait des sommes. Le REÉR est donc avantageux notamment lorsque notre taux d'imposition est plus élevé durant nos années de travail qu'au moment de la retraite.

Pour une année donnée, on peut cotiser à un REÉR jusqu'à 60 jours après le début de l'année suivante (1er mars ou 29 février). La contribution au REÉR réduit notre revenu imposable, ce qui entraîne une économie d'impôts. Il est aussi possible de reporter cette déduction à une année future.

Il n'y a pas d'âge minimal pour cotiser à un REÉR : il suffit d'avoir des revenus d'emplois et un numéro d'assurance-sociale. Le plafond des cotisations est fixé chaque année par l'ARC : il est de 18% de nos revenus bruts de l'année (moyennant quelques facteurs de correction) pour un maximum en 2013 de 23 820$. Un 2000$ additionnel à vie est permis, mais sans donner droit à une réduction du revenu imposable. Il n'est pas du tout avantageux de cotiser davantage, puisque chaque dollar au-dessus de notre plafond personnel de cotisation est imposé à 1% par mois et ce, jusqu'à ce que l'argent en trop soit retiré.

Il existe plusieurs types des REÉR :
  • REÉR de fonds communs de placements gérés par des professionnels du milieu financier;
  • REÉR autogérés où l'investisseur choisit lui-même ses produits financiers et les montants investis;
  • REÉR collectifs (tel que vus dans la Partie 2);
  • Fonds de travailleurs (FTQ, CSN).

Il est possible de cotiser dans le REÉR de son conjoint. Après deux ans, les contributions appartiennent alors en droit à ce dernier. Avant cela, si elles sont retirées, elles sont imposées au nom du conjoint qui a fait le dépôt : c'est ce qu'on appelle les règles d'attribution. L'objectif de ce genre de manoeuvre est de fractionner les revenus et d'équilibrer le plus possible les taux d'imposition des deux conjoints.

Il est également possible d'effectuer un emprunt à court terme dans le but de cotiser à un REÉR. Il faut alors faire attention à ce que les frais d'intérêts du prêt ne viennent pas annihiler les bénéfices du REÉR. C'est une stratégie souvent mise de l'avant par les institutions financières. La raison la plus fréquente est pour "RAPper", soit profiter du Régime d'accession à la propriété (RAP), dont je parlerai dans un prochain billet.

c) Le compte d'épargne libre d'impôt (CÉLI)

Créé en 2009, le CÉLI est un régime complémentaire au REÉR. On y cotise avec de l'argent déjà imposé, mais celui-ci croît à l'abri de l'impôt et n'est pas non plus imposé lors du retrait. Sur le graphique plus haut, cela correspond à la courbe rouge. C'est donc dire que pour un taux d'imposition constant, le REÉR et le CÉLI s'équivalent.

Le nom "compte d'épargne libre d'impôt" porte malheureusement à confusion car plusieurs types d'investissements sont éligibles à faire partie d'un CÉLI, pas seulement les comptes d'épargne.

L'âge minimal pour cotiser est de 18 ans (aucun âge maximal). Il n'est pas nécessaire d'avoir des revenus d'emploi pour cotiser mais il faut produire tout de même une déclaration de revenus. À chaque année, le plafond de cotisation augmente d'un certain montant (5000$ de 2009 à 2012, 5500$ en 2013). Cela signifie qu'en 2013, le plafond total maximal est de 25 500$. Comme le REÉR, toute cotisation excédentaire est imposée à un taux de 1% par mois.

Par contre, contrairement au REÉR, il est possible de retirer des fonds d'un CÉLI sans conséquence fiscale et à n'importe quelle fin. Le montant retiré donne de nouveaux droits de cotisation équivalents l'année suivante (mais pas avant). Cela signifie que si mes cotisations CÉLI sont épuisées et que je retiré 100$ cette année, je ne pourrai remettre ce 100$ que l'année suivante.

Il n'est pas possible de cotiser au CÉLI de son conjoint. Cependant, un montant peut être donné à celui-ci pour qu'il contribue à son propre CÉLI. Les règles d'attribution comme celles du REÉR ne s'appliquent pas.

L'utilisation du CÉLI peut donc être facilement combinée avec celle du REÉR pour la plupart des gens. Il s'agit de peser les avantages et inconvénients de chacun et de bien cerner nos objectifs d'épargne. Une règle est toutefois à garder en tête : il vaut généralement mieux investir dans un régime enregistré avant de le faire de façon non enregistrée à cause de l'économie d'impôts et de la croissance plus rapide permise par les régimes enregistrés.

d) Les comptes non enregistrés

Comme nous l'avons vu, les investissements réalisés sous des régimes enregistrés ont l'avantage de croître à l'abri de l'impôt. Cependant, si nos droits de cotisation sont épuisés, il est nécessaire de se tourner vers les investissements non enregistrés.

Les choses se compliquent alors un peu lorsqu'il vient le temps de remplir une déclaration de revenus. En effet, les gains et pertes en capital, les dividendes et les intérêts sont taxés de manière différente :
  1. Les gains et pertes en capital : Lorsque la vente d'un actif rapporte plus que ce qu'il en a coûté, on est en situation de gain de capital. La moitié de la valeur de ce gain est imposable. Si par contre il y a perte, celle-ci vient réduire la somme des gains de l'année. La déduction pour la perte peut ensuite être reportée aux trois années précédentes ou à n'importe quelle des années suivantes.
  2. Les dividendes : Lorsqu'on possède une part dans une compagnie (via des actions), il arrive que celle-ci retourne ses profits aux investisseurs sous la forme de dividendes. Les dividendes de compagnies canadiennes bénéficient d'un allègement fiscal : grosso modo, puisque les impôts ont déjà été payés par la compagnie avant la distribution des profits, un calcul est effectué pour que l'investisseur ne se retrouve pas à payer cet impôt en double. Un tel traitement fiscal ne s'applique pas aux dividendes de compagnies étrangères.
  3. Les intérêts : Produits par des contrats de placement (comptes d'épargne, certificats de placement garantis, obligations, bons du Trésor, etc.), ceux-ci sont imposables à 100%. L'impôt doit être payé pour l'année où les intérêts sont versés.
Il existe d'autres régimes enregistrés qui viennent combler un besoin autre que celui de la retraite : il s'agit du régime enregistré d'épargne-études (REÉÉ) et le régime enregistré d'épargne-invalidité (REÉI). Nous en discuterons dans le prochain billet.

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